Françoise Pétrovitch poursuit une œuvre singulière dont la base est le dessin (lavis et encres sur papier, sérigraphies, wall drawing…) qui prend forme ensuite dans l’espace à travers des sculptures et installations en céramique ou en verre soufflé. Cette approche environnementale développée à partir du début des années deux mille est une manière de concrétiser davantage une pensée déjà présente dans ses dessins ; celle du passage, de la frontière entre plusieurs états qui n’ont de cesse de se transformer dans ce temps qui relie l’enfance à l’adolescence, l’âge adulte au statut de femme, puis de mère... faisant ressurgir la mémoire naïve et monstrueuse à la fois de notre histoire. La réalité se mêle à l’étrangeté dans un univers fantasmagorique qui lui est très personnel. Le changement d’échelle, tant dans le dessin que dans les pièces en céramique, est fréquent dans son travail et nous fait appréhender ses modèles comme des figures monumentales qui s’imposent à nous, ou a contrario comme des « familiers » aux dimensions des jouets d’enfants.
Sa résidence à Saint-Claude s’inscrit avant tout dans une tradition revisitée du dessin avec la réalisation d’un dessin mural dans l’une des salles du musée. Parallèlement, l’artiste a souvent eu recours à des techniques liées à des savoir-faire spécifiques selon les œuvres qu’elle souhaitait créer (le tournage pour la céramique à Saint-Amand-en-Puisaye et à la Manufacture de Sèvres, le verre soufflé lors de sa résidence à Meisenthal, l’émaillage à Morez…). Avec l’opportunité de relier une résidence à une exposition, des pièces ont été réalisées in situ en mêlant les spécificités culturelles et artisanales de Saint-Claude : la co-production d’une sérigraphie grand format avec l’espace arts plastiques de l’association La fraternelle et la réalisation de pipes sculptées à partir de son univers dessiné avec la contribution de Roger Vincent, meilleur ouvrier de France, impliqué dans ce projet par l’intermédiaire de l’Atelier des savoir-faire de Ravilloles.
Un retour à la peinture. Renouant avec ce médium et choisissant le musée de l’Abbaye qui conserve et expose un nombre conséquent d’œuvres picturales où la figure est présente, l’artiste présente pour la première fois depuis dix ans, une série de peintures débutée en 2010 et continuée en 2012 lors d’une résidence en Corrèze. Les figures qui se détachent sur la toile écrue dans ses premières peintures, laissent place à un travail qui prend davantage en compte le fond peint à partir duquel les sujets apparaissent. Après le dessin, Françoise Pétrovitch s’autorise à peindre, en intégrant les recherches qui lui sont propres : la référence à l’enfance, à la question du double, à la disparition…